LE LUTH (introduction historique)
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Le luth de l'ancienne Egypte (et de l'actuel Soudan occidental) a une caisse étroite voire "naviforme"; ici l'on a procédé en respectant moins la sphéricité du résonateur
que l'allongement du bois de l'arc. En résumé, l'arc et le résonateur paraissent ne s'être jamais combinés à proportions égales, comme le laisseraient supposer tant de manches longs ou courts bizarrement mariés à des caisses menues ou énormes. De toute manière la partie antérieure du résonateur, ou la pièce au revers de laquelle il est fixé, tendit à s'aplatir et constitua une "table", au sens de ce terme dans notre lutherie moderne; à cette table en peau ou même déjà en bois mince, les cordes communiquèrent directement ou indirectement leurs vibrations.
Il n'y eut plus d'autre invention importante, tous les éléments étaient en place, et la table elle-même pouvant provenir de l'application à des instruments évolués d'un
procédé très primitif: la plaque qui recouvrait la fosse en terre. Plaque et cavité, l'une au moins, sinon les deux, ont déterminé depuis l'origine la structure du plus grand nombre d'instruments. |
Dans la tombe d'un certain HARMOSE, vivant à Thèbes vers 1490 av.J.-C, fut découvert un luth parfaitement conservé, encore muni de ses cordes. C'est le plus ancien
spécimen égyptien connu de cet instrument né en Asie. Conservé au Musée du Caire, il mesure 1,195 m de long. Sa caisse de résonance, ovale, en bois de cèdre, a 43 cm de long sur 11,5 cm de large et 8 cm de profondeur; ses parois, très fines, ont seulement 3 mm par endroits. Elle est couverte d'une peau qui constitue la table supérieure et y fut fixée humide pour se tendre en séchant. En huit endroits où les fentes avaient été préparées, le manche traverse. Il porte à sa partie terminale une pièce de bois triangulaire en relief, creusée de trois rainures où passaient les cordes de boyau. Celles-ci partaient d'un bouton en saillie qui forme l'extrémité du manche transperçant la caisse; à leur bout, elles passaient sur un "sillet", puis étaient prises sous un lacet de toile double enroulée six fois, noué et aux bouts pendants; la longueur vibrante est de 0,97 m. Chaque corde a son propre lien, mais elles passent toutes trois sous le premier (voir le schéma plus bas).
Cet instrument est connu depuis la fin du troisième millénaire en Babylonie et chez les Hittites. De Tello (Lagash), il est par exception, pourvu de chevilles d'arrêt.
Généralement, les cordes sont fixées par de simples ligatures. Le manche est cylindrique. On a un très beau spécimen égyptien de la XVIIIe dynastie, époque où cet instrument est largement adopté dans la vallée du Nil. Il est toujours joué avec un plectre. |
SUITE
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L'iconographie la plus ancienne connue à ce jour, représentant un instrument à cordes avec caisse de résonance et manche, date d'environ 2500 av.J.-C. Il s'agit d'une
tablette d'argile cuite trouvée à l'emplacement de l'ancienne ville mésopotamienne de Nippour, jadis ville sainte des Sumériens. On y distingue modelé en relief, un être humain en position assise avec devant lui un chien la gueule ouverte et la queue recourbée. Le personnage tient son instrument, une petite boîte ovale au long manche, horizontalement devant la poitrine, les doigts de la main gauche posés sur la touche et la main droite à la hauteur de la caisse. Les rapports de longueur entre le résonateur (ou caisse de résonance) et manche laissent supposer que ce dernier traverse la caisse de part en part, procédé assurant une statique sans problèmes. Une ou plusieurs cordes sont simplement attachées au bout du manche. Malgré le fait qu'il s'agisse là de la première représentation d'un instrument à cordes, cela indique le résultat d'un long développement plutôt qu'une invention spontanée. |
Tablette d'argile mésopotamienne représentant un joueur de luth à pointe.
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Des représentations mésopotamiennes, hittites, assyriennes, phéniciennes et d'autres d'Asie mineure plus récentes abondent. Il serait néanmoins intéressant de
mentionner parmi elles une sculpture en bas-relief hittite (400 av.J.-C), provenant de Bos-ôjuk en Turquie, montrant un instrument ayant nettement la forme d'une guitare et d'un manche avec des frettes, ce qui indiquerait l'existence d'une gamme musicale déterminée.
Papyrus et bas-reliefs égyptiens fournissent une quantité innombrable d'images d'instruments utilisés pendant les différentes époques. Cela prouve le rôle important
joué par la musique pendant toutes les manifestations de la vie quotidienne de l'Egyptien dans l'Antiquité. Des instruments de toutes tailles produisant des sons, du plus grave à l'aigu extrême, nous renseignent sur leur goût pour la musique. Le grand raffinement et la sensibilité artistique de l'époque poussaient les luthiers égyptiens à créer des instruments à tessiture et timbre divers, prouvant ainsi leur capacité d'appréciation des nuances. Au cours du développement musical se constituent des familles entières d'instruments, comme toutes sortes de harpes, lyres, et luths, en dehors d'une gamme considérable de flûtes. |
Intérieur d'un luth datant de 700 av.J.-C; Musée du Louvre.
D'après une étude récente, les trois cordes du luth étaient accordées à l'unisson. L'une d'elles représente dans ce cas la note dite "bourdon", tandis
que les autres ont produit la partie mélodique telles des mandolines modernes. |
LUTH
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LUTH HITTITE
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AUTRE COUPE
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Instruments par époque
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Instruments par époque
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photo plus détaillée en bas de la page
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Nous sommes ici en présence d'un instrument typique de la XVIIIe dynastie. Au manche de ce luth égyptien est accroché un plectre, fine pièce
de métal ou d'os, servant à égréner les cordes. L: 119,5 cm. |
Au cours de cette scène, figurant sur un des murs de la tombe thébaine du prince HARMHABI, et représentant un banquet funéraire organisé à son intention, participent deux
luthistes que nous pouvons voir au centre. |